D comme Dormira

Edmée DormiraD-Edmée-Dormira

S’agissait-il d’un bébé qui dormait ? Ou au contraire d’un bébé qui a passé la nuit où il a été trouvé à pleurer ? Je pencherais pour la deuxième branche de l’alternative, pour des adultes épuisés répétant à l’envie : « Elle finira bien par dormir », ce 12 juillet 1820. Edmée, un bébé déjà grand, une toute petite fille même, car elle est âgée de près d’un an et demi.

L’officier d’état civil, avec une précision stupéfiante, indiquera à son sujet « paraissant avoir dix-sept mois seize jours ». Ne vous inquiétez pas, il n’était pas devin (ni expert en mathématiques, d’ailleurs). Edmée portait en effet sur elle un billet rédigé en ces termes : « Je suis née le 24 janvier 1819. Baptisée le 25. Je m’appelle Edmée ». La petite Edmée venait sans doute de la campagne alentour. Aucune naissance d’Edmée n’est en tout cas répertoriée à cette date à Joigny.

Eugénie Départ

Un nouveau-né de plus devant la porte de l’hospice, ce 18 avril 1821. Une petite fille tout en blanc, si l’on excepte le lange en laine de plusieurs couleurs (ainsi que le drapeau et le morceau de toile, dont la couleur n’est pas précisée).

L’officier d’état civil lui attribuera le nom d’Eugénie Départ, et l’hospice l’expédiera aussitôt pour la campagne. Elle décède à Cézy trois jours plus tard, le 21 avril 1821, ainsi que le déclare Marguerite Galimard, veuve Chiquois, qui produit à cet effet le bulletin délivré par la Commission administrative de l’hospice de Joigny.

D-Eugénie-DépartAD-89, Cézy, D 1815-1835, vue 61

Victoire Décaves

23 décembre 1821. Noël approche à grand pas. Dehors, c’est l’hiver, la nuit tombe tôt. Pourtant, c’est à onze heures du soir, dans des températures sans doute glaciales, que sera découverte la petite Victoire Décaves, ainsi que la nommera l’officier d’état civil.

Un bébé nouveau-né, la tête couverte d’un béguin en toile blanche et d’un bonnet en toile d’orange, le corps enveloppé d’une chemise, d’une brassière de coton blanc, d’un fichu de coton rouge et de deux langes en laine brune de plusieurs pièces. Aucune marque. Comme la plupart des enfants de l’hospice de Joigny, j’ignore ce qu’elle est devenue.

Et aussi : Victor Dentelle, Hubert Dommery, Marie Donnat, Marie Françoise Dubox, Justine Dulan.

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12 commentaires pour D comme Dormira

  1. Raymond dit :

    J’étais un peu perplexe au tout départ, mais je dois bien le reconnaître au bout de 4 articles, ton challenge est très touchant et il le sera de plus en plus. Tous ces enfants abandonnés, les noms et prénoms qui leur a été donné, les conditions de l’abandon, leur destin plus ou moins long… c’est émouvant. Un très beau et important travail mémoriel (et très bien écrit) ! Bravo et merci.

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    • wurtzele1 dit :

      Tout est dit 🙂

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    • Pauline dit :

      Merci, cela me touche beaucoup.
      Pour tout dire, perplexe, c’est moi qui le suis encore aujourd’hui : je voulais faire ce thème depuis un bon moment, je trouvais que le format « alphabétique » collait bien, mais je me suis lancée là-dedans avec sept articles plus ou moins écrits, et sans savoir si j’aurai la matière nécessaire pour aller jusqu’au bout. Je me suis dit que s’il y en avait pour sept (désormais onze), il y en aurait bien pour vingt-six ;-).
      Le risque, j’en étais consciente, c’était de finir par lasser (et, au vu des statistiques aimablement fournis par WordPress, c’est un peu le cas). Mais, après une plongée dans les abîmes des registres des « naissances » (hum…) et l’effarement consécutif, il était important pour moi de parler de toutes ces vies.

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      • Raymond dit :

        Moi je ne me lasse pas, au contraire. Sinon, je pense qu’après l’engouement du début (vouloir tout lire), on est bien obligé de laisser des articles pour les lire plus tard, d’où la baisse. C’est pareil pour moi 🙂

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  2. Pauline dit :

    Merci, et merci de me rassurer. J’avais aussi envisagé cette hypothèse, mais comme je sais que mes articles peuvent avoir un petit côté répétitif, je penchais plutôt là-dessus. C’est vrai qu’il est difficile de tout suivre. J’essaye de lire, d’écrire mes articles, d’avancer dans tout ce que j’ai à faire avant fin juin, et de vivre un peu à côté de tout ça, mais ce n’est pas toujours franchement compatible, et je pense finir par ralentir le rythme niveau lecture… (mais ce ne sera que partie remise 😉 )

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  3. Marino Branne dit :

    Bien au contraire aucune lassitude à la lecture de ces articles, Raymond a bien résumé ce qui fait la particularité de ces billets. Bien qu’il soit difficile de lire 75 articles par jour, nous avons tous des thèmes qui nous touchent plus que d’autres.

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    • Pauline dit :

      Merci ! C’est normal qu’après l’effervescence du premier jour (où chacun « fait son marché », on ne peut malheureusement pas tout lire), les choses se soient un peu calmées, mais ce qui m’inquiétait, c’est que cela se poursuivait (et comme je m’étais moi-même posé la question avant de me lancer…). Ouf, me voilà rassurée !

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  4. J’aime beaucoup ses histoires, vos histoires, elles sont touchantes et font une jolie place à tous ces laissés-pour-compte.

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    • Oups, une jolie faute ces histoires et non pas ses !

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      • Pauline dit :

        Merci ! Et pas de complexe pour l’orthographe, je suis moi aussi en mode « arghh » quand je me rends compte que j’ai laissé une jolie faute quelque part. J’ai trouvé le moyen, alors que je me suis relue et rerelue, de faire une énorme faute dès le premier verbe de A comme avril (comment bien démarrer le challenge…^^), faute qui y est restée toute la journée, avant que « arghh », justement. L’avantage, c’est que je peux éditer :-).

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  5. wurtzele1 dit :

    Des fautes, j’en ai tellement qui traînent qu’à la fin je n’y prête plus attention, préférant me mettre en mode « autruche » pour mieux scruter les racines. Quand j’arrive à en débusquer une, je suis content, mais ce n’est pas une priorité. Il n’y a pas de quoi en faire un fromage, plus on écrit vite, plus on se plante et on dégrise: c’est Argh gris culture!

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